Le nouveau Code du développement territorial adopté

Bativox

Le Parlement de Wallonie vient de valider la réforme du Code du développement territorial (CoDT) pour répondre aux défis auxquels notre société est confrontée et aux attentes des citoyens ainsi que des praticiens de la matière.

Le nouveau décret, qui entrera en vigueur le 1er avril 2024, comporte cinq volets :

  1. Il adapte le CoDT aux objectifs de réduction de l’étalement urbain et de l’artificialisation en créant le concept novateur d’optimisation spatiale
  2. Il procède à l’abrogation du décret du 5 février 2015 relatif aux implantations commerciales, ce qui a pour conséquence que les futurs permis d’implantations commerciales deviendront des permis d’urbanisme
  3. Il procède à plusieurs améliorations du CoDT, notamment en ce qui concerne la procédure de délivrance de permis et en matière de charges d’urbanisme
  4. Il propose de nouvelles mesures en matière de lutte contre les inondations et il intègre les recommandations de la commission d’enquête parlementaire chargée d’examiner les causes et d’évaluer la gestion des inondations de juillet 2021
  5. Il tire les leçons administratives du covid.

1. Mettre en œuvre l’optimisation spatiale (réduire l’étalement urbain et l’artificialisation)

Depuis les années 50, les croissances économiques et démographiques, ajoutées aux modifications dans les modes d’habiter, de travailler et de consommer et aux règles d’urbanisation en ruban, ont entrainé un étalement de l’urbanisation au détriment, essentiellement, des terres agricoles, des espaces naturels et de l’attractivité des centres-villes.

Entre 1985 et 2021, les terrains visés par ce phénomène (sans les espaces non cadastrés) ont connu une croissance de 562 km². La croissance des terrains artificialisés a été la plus intense entre la fin des années 80 et la fin des années 90, avec une artificialisation moyenne de plus de 18 km2/an. Durant les années 2000, l’artificialisation est tombée à 16 km2/an pour arriver ces dernières années à 11,3 km2/an. Or, les terres non artificialisées constituent une ressource essentielle finie, qui participe, avec d’autres, à la résilience de notre territoire, à la lutte contre les changements climatiques... La lutte contre l’étalement urbain est donc une réforme prioritaire portée par le Gouvernement wallon.

"Bien entendu, nous souhaitons prioritairement privilégier la qualité de vie tant dans les villages que dans les villes, et répondre aux choix et aux aspirations légitimes de nos concitoyens dans une approche équilibrée et concertée"

Willy BORSUS Ministre de l'Aménagement du territoire

Pour faire face à ce défi et dans une logique de confiance, le nouveau Code procurera la base légale nécessaire aux Villes et communes pour élaborer leur stratégie basée sur le nouveau schéma de développement du territoire (SDT).

Ce n’est que pour les Villes et communes qui ne seraient pas dotées de cet outil dans les 6 ans que le nouveau Code prévoit la possibilité d’inscrire dans le SDT, des centralités et des mesures guidant l’urbanisation qui, elles-mêmes ne s’appliqueront qu’à défaut de centralités et de mesures consacrées par un SDC ou SDP. Il s’agit d’une logique entièrement supplétive, de subsidiarité : les centralités et mesures guidant l’urbanisation du SDT cesseront de s’appliquer dès que la commune se sera dotée d’un SDC ou d’un SDP incluant l’optimisation spatiale.

La réforme prévoit aussi, pour les communes qui se seront dotées d’un SDC, que l’avis du fonctionnaire délégué ne devra plus être sollicité pour les demandes de permis situées à l’intérieur des centralités. Une politique de soutien financier accrue (subventions) pour l’élaboration des SDC sera, en outre, prévue dans le cadre de la réforme à venir de la partie réglementaire.

2. Les implantations commerciales désormais soumises à un permis d’urbanisme

La réforme abroge le décret du 5 février 2015 relatif aux implantations commerciales. Pour rappel, cette compétence avait été régionalisée en 2014. La gestion de cette compétence, après transfert, s’est réalisée de manière différente par les trois Régions. La Wallonie a, à l’époque, fait le choix de maintenir une réglementation des implantations commerciales distincte de celle de l’urbanisme et du permis d’environnement, en créant un régime particulier tant de planification que d’autorisation. Entre juin 2015 et février 2022, 1.032 demandes de permis d’implantation commerciale ou de permis intégrés ont été introduits, donnant lieu à 805 décisions finales.

Le Parlement vient de valider les règles suivantes :

  • les projets d’implantation commerciale de moins de 1.500 m² relèveront d’une décision communale
  • ceux de plus de 1.500 m² du Fonctionnaire délégué et ce, dans le but de favoriser une meilleure approche globale du territoire pour des projets qui, par nature, sont plus susceptibles que d’autres d’avoir des incidences supra-communales.
  • Pour les communes disposant d’un SDC, le seuil d’intervention du Fonctionnaire délégué restera, quant à lui, fixé à 2.500 m² à l’intérieur des centralités communales.

D’autres modalités sont mises en place :

  • l’avis obligatoire des communes limitrophes lorsque le projet a une surface commerciale nette égale ou supérieure à 1.000 m2
  • la tenue systématique d’une enquête publique (ramenée à 15 jours pour être alignée sur le régime général du CoDT).
  • l’avis spécialisé qu’offrait l’Observatoire du commerce,  sera remplacé par un avis pour les projets d’une surface commerciale nette égale ou supérieure à 1.000 m2 de la Direction des implantations commerciales et de la nouvelle section du pôle « Aménagement », qui sera également chargée des avis en matière de planification.
  • la commission d’avis sur les recours verra sa composition  adaptée  lorsqu’elle statuera sur des permis relatifs à des commerces soumis à permis d’urbanisme.

Par ailleurs, la planification commerciale est désormais ramenée dans la planification urbanistique aussi bien au niveau régional (dans le schéma de développement du territoire) qu’au niveau communal (dans les schémas de développement communaux ou pluricommunaux) concrétisant ainsi la Déclaration de politique régionale qui promeut la fusion des plans et des permis commerciaux dans les outils de l’aménagement du territoire.

3. Des procédures de délivrance de permis harmonisées et optimisées et plus de flexibilité dans les charges d’urbanisme

La procédure de délivrance des permis et certificats est, elle aussi, optimisée. Les modifications proposées à ce titre sont de 3 types :

  • clarification de textes qui, à l’usage, ont révélé des difficultés d’interprétation ; rationalisation et simplification des procédures, tant pour les autorités que pour les demandeurs d’autorisation. L’accent est mis sur l’efficacité et l’économie procédurale. Un alignement des procédures est aussi recherché. A ce titre, les missions imparties aux fonctionnaires délégués et les conditions de leur exercice sont ajustées au niveau des délais et quant à leur rôle, en supprimant l’exigence d’une proposition de décision devant accompagner leur avis. La conséquence en est également, une plus grande harmonie des procédures, en cas d’absence de décision du collège communal dans le délai via la généralisation du mécanisme de saisine. A ce titre également, les délais de consultations sont tous alignés à 30 jours, sauf celui des service Incendie.
  • assouplissement de certaines contraintes : d’une part, le régime des plans modifiés est revu et clarifié en créant un véritable  droit d’initiative au profit du demandeur et en permettant son usage au stade du recours. D’autre part, un mécanisme entièrement nouveau de permis modificatif est également créé afin de permettre les dernières adaptations que requièrent parfois les projets au cours de leur mise en œuvre sur le terrain.
  • Les charges d’urbanisme ont pour but de « compenser l’impact que le projet fait peser sur la collectivité au niveau communal dans le respect du principe de proportionnalité ».

Leur mise en œuvre se heurte cependant à des difficultés pratiques qui en réduisent l’usage. La réforme suggère de lever ces verrous pour permettre aux autorités locales un meilleur recours aux charges afin d’avoir une approche plus égalitaire que celle constatée aujourd’hui.

 

Quatre apports majeurs sont décidés :

  • l’introduction des charges en numéraire, autrement dit, la possibilité pour un promoteur de payer un montant équivalent à la charge demandée ;
  • la possibilité d’autoriser la réalisation de charges en nature dans une autorisation distincte du permis chargé.
  • pour les projets dont la mise en œuvre s’opère au travers de plusieurs autorisations, l’insertion d’un principe d’imposition des charges dans la première autorisation dont l’instruction fait apparaître l’impact négatif à compenser.
  • Enfin, pour tout projet de création d’au moins trente logement neufs, 40 % de la charge sera affectée à du logement d’utilité publique. Ce faisant, la réforme participe à l’effort au bénéfice du logement public, qui tend à consacrer le droit constitutionnel à un logement décent.

4. Intégrer les recommandations de la Commission d’enquête parlementaire inondations

La gravité dramatique des inondations qu’a connues la Wallonie en juillet 2021 et le rapport de la commission d’enquête parlementaire chargée d’examiner les causes et d’évaluer la gestion des inondations de juillet 2021 en Wallonie obligent évidemment le Gouvernement à s’assurer du fait que la réforme présentée intègre bien toutes les modifications nécessaires.

 

Citons par exemples les modifications suivantes :

  • Les pouvoirs de tutelle des Fonctionnaires délégués seront modifiés pour les autoriser à suspendre les permis qui ne prennent pas adéquatement en considération les risques naturels ou contraintes géotechniques majeurs, parmi lesquels figurent, évidemment, les inondations. Ce faisant, il s’agit d’étendre la surveillance des fonctionnaires au-delà des seules motivation et légalité de l’autorisation.
  • L’intégration le plus en amont possible de la problématique des risques naturels dans l’élaboration des plans et schémas d’aménagement du territoire.
  • La consultation de la cellule GISER, des gestionnaires de cours d’eau et des gestionnaires de réseaux d’égouttage est déjà obligatoire dans tous les cas où elle peut être pertinente. Le Gouvernement modifie le code pour renforcer la consultation des instances compétentes non seulement au stade de l’instruction des permis mais aussi le plus en amont possible dans la constitution du projet lui-même, lors des réunions de projets.

5. Tirer les leçons administratives du covid

La réforme propose enfin de tirer les leçons des mesures mises en œuvre, dans l’urgence, au moment de l’apparition de la pandémie. En effet, la dématérialisation des process a montré certains avantages qu’il convient de pérenniser.

  • La virtualisation des réunions de la Commission d’Avis sur les Recours a induit une plus grande présence des représentants communaux, tout en facilitant les échanges notamment autour des documents partagés par écran. Elle sera consacrée.
  • La possibilité d’organiser des réunions de projet, des réunions du Pôle Aménagement ou des réunions de CCATM en visio-conférence pourrait, de la même manière, renforcer la participation de leurs membres. Le projet prévoit une habilitation au Gouvernement en ce sens.
  • L’organisation des réunions d’information préalables (RIP) en distanciel a favorisé une meilleure participation du public que le déplacement à une réunion physique peut décourager. Il convient dès lors de conserver cette possibilité d’information à distance tout en maintenant les réunions présentielles dont les interactions sont différentes et qui évitent l’exclusion numérique.
  • Des possibilités complémentaires pour le public de participer à distance aux mesures de publicité sont également intégrées dans le code.
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